Mes balades dans Paris
La tour Eiffel prisonnière d'interminables travaux
La tour Eiffel a 125 ans. Pas la moindre cérémonie pour cet anniversaire. « Nous avions marqué le coup pour les 120 ans », avance pour s'excuser Jean-Bernard Bros, l'adjoint au maire (PS) de la capitale, chargé du tourisme, qui préside aussi la Société d'exploitation de la tour Eiffel (SETE).
En réalité, la vieille dame de fer ne peut guère recevoir. Elle est de nouveau en pleins travaux, prisonnière d'un chantier qui s'éternise diaboliquement. Le premier étage est en complète réfection, une plate-forme a été installée entre les piliers pour acheminer le matériel et descendre les déblais. Et, surtout, deux des trois ascenseurs destinés au public sont à l'arrêt.
Une catastrophe pour un monument qui dépend autant des moyens d'ascension. Les jours de pointe, les touristes peuvent faire trois ou quatre heures de queue. « C'est vrai, on accueille parfois les visiteurs dans des conditions qui ne sont pas dignes », reconnaît M. Bros. Alors, pour la fête, il est urgent d'attendre…
En 2008, quand la rénovation de l'ascenseur ouest a été décidée, le chantier devait durer deux ans. En fait, cet ascenseur à été remis en service qu'à la mi-mai, après… six ans de travaux !
« TROIS FOIS PLUS LONG ET TROIS FOIS PLUS COÛTEUX QUE PRÉVU »
« Cela aura été trois fois plus long et trois fois plus coûteux que prévu », résume Eric Spitz, le directeur général de la SETE. La facture pour ce seul appareil est aujourd'hui estimée à 36 millions d'euros. Sans doute l'ascenseur le plus cher au monde…
C'est que sur la tour, rien n'est standard. Et que le choix de conserver un système hydraulique, comme à l'origine, a encore compliqué la tâche. « Peu à peu, on a découvert qu'il fallait refaire les rails, les cuves, que de nouvelles études étaient nécessaires, raconte M. Bros. On a aussi trouvé du plomb. Bref, on a gardé l'esprit de Gustave Eiffel, mais cela a été une horreur ! »
Ces années d'arrêt momentané ont en outre entraîné un sérieux manque à gagner. Le nombre de visiteurs a pu remonter de 7 % en 2013. Si bien que la SETE, la société d'économie mixte contrôlée par la Ville, est redevenue rentable, avec un bénéfice net de 6 millions d'euros pour des recettes de 73 millions.
Mais compte tenu du retard pris, les dirigeants ont dû admettre qu'ils ne pourraient pas effectuer tous les investissements promis d'ici à la fin de la concession, en décembre 2015. Un avenant a donc été signé en décembre 2013. Il autorise notamment la SETE à ne pas rénover l'ascenseur Est ni à aménager le parvis. En échange, la société signera, en 2014, un chèque exceptionnel de 16 millions d'euros à la Ville.
La tour n'est pas sortie d'affaire pour autant. Un coup d'oeil au premier étage suffit pour s'en rendre compte. Crissement des scies, odeur de peinture : ici, le chantier bat son plein et va durer encore des mois. Dans le pavillon Ferrié, des ouvriers préparent les boutiques et le petit musée qui doivent ouvrir en juillet. Dans le salon Eiffel, déjà livré, on ajuste la moquette pour de prochaines réunions d'entreprises.
Et tout autour du trou central, un plancher et des vitres de verre sont en cours d'installation, pour donner l'impression de marcher dans le vide, à 57 mètres au-dessus du sol. Frisson garanti. « Vas-y, saute en fermant les yeux ! » Les enfants se lancent les premiers. Les adultes sont plus inquiets : « Il est solide, le verre ? »
Photo internet.
PROJET D'UN OU DEUX ÉTAGES EN PLUS
Quitte à mieux accueillir les touristes et monter en gamme, l'étape suivante, le grand saut, pourrait consister à doter la tour d'un ou deux étages en plus. Fou ? Pas tant que cela. Creuser sous le parvis pour aménager un hall d'entrée en sous-sol, sur le modèle du Louvre, paraît possible.
Mais bien des questions demeurent. Que trouverait-on en bas : des caisses, des toilettes, des restaurants, un musée, des bureaux ? Faut-il prévoir des boutiques ? Peut-on créer une station de métro sur place ? Sans oublier le casse-tête financier. Le chantier pourrait dépasser 100 ou 200 millions d'euros et « l'équation économique reste à résoudre », constate M. Bros.
En son temps, Gustave Eiffel s'était heurté aux mêmes difficultés et avait imaginé un montage innovant, les banques se remboursant directement par la vente des tickets. Pari gagné : depuis, 250 millions de personnes ont arpenté la tour…
* Sources : ICI